vendredi 30 avril 2010

Drive the Great Wall into the sea

Aujourd’hui 30 avril. Dernier jour d’un mois marqué par une météo détestable. Il faisait froid, il ventait et il pleuvait. Il y même eu une sacrée 4ème rechute des températures, et le buzz du mois a donc été la disparition du printemps Pékinois. Enfin aujourd’hui il fait beau et chaud, et ce pour le 2ème jour consécutif, se pourrait-il que cela dure ? Nous l’espérons car à l’occasion du 1er mai et de la fête du travail, nous avons le droit à un grand week-end. C’est l’occasion de bouger et d’aller prendre quelques couleurs avant que les chaleurs estivales ne viennent nous assommer. Destination Hebei pour un week-end spécial grande muraille baptisé « Drive the Great Wall into the sea trip » par Magic Michael. 

Avec une voiture personnelle pour plus de libertés, nous irons chercher la grande muraille à son extrémité Est, là où elle se jette dans la mer du Bohai à Shanhaiguan (山海关). A 4-5 heures d’autoroute de Pékin, cette zone a longtemps marqué la zone d’affrontements entre les envahisseurs du Nord-Est et les Chinois. Lieu d’affrontements incessants, la muraille autour de Shanhaiguan aura failli à deux occasions durant l’histoire. Une première fois par trahison d’un général chinois lorsqu’il laissa passer les Mandchous en 1644, ce qui sonnera le glas de la dynastie Ming, une seconde fois, plus symboliquement, en 1937 lors de l’invasion Japonaise de la Chine. 

Nous poursuivrons à pied vers Sandaoguan (三道关), un des secteurs connus pour être parmi les plus à-pics de la grande muraille. On qualifie l’endroit de 长城倒挂, le lieu où la muraille se retrouve à l’envers, on attend donc du grand spectacle !

Le troisième jour devrait être plus poétique autour de Xifengkou 喜峰口, un tronçon de la muraille qui s’est retrouvé immergé sous les eaux suite à la formation d’une retenue d’eau, le reservoir de Panjiakou 潘家口水口. Il parait que l’on peut apercevoir la muraille immergé depuis le sommet des collines environnantes, et qu’elle prend des formes de dragon endormi sous les eaux…

我又上路了!

mercredi 28 avril 2010

Repas 8ème

Jeudi soir au Ouïghour d'Wudaokou avec les amis du 8ème.

Taux d'absence des Coréen(ne)s: 92%
Taux de présence des non Coréen(ne)s: 92% aussi...

mardi 27 avril 2010

Sympatiques Caractères

Moins de 3 semaines avant mes prochaines vacances. D’ici là encore un peu de temps pour engranger toujours plus de nouveaux caractères. Petite sélection des caractères les plus indiscernables sur les téléphones portables :

: gēng, 19 traits. Désigne une sorte de ragout. Il était présent sur toutes les cartes du Fujian.

: xīn, 20 traits. Utilisé dans 温馨提示 : Avertissement amical, c’est l’en-tête de tous les messages d’information que l’on trouve placardé en chine.

: zuàn, 23 traits. Serrer fortement dans son poing. On peut essayer de le décomposer en 2 mots : 紧握 : 10+12 = 22 traits. Bon, on a gagné un trait, c’est déjà ça :)

: lín, 23 traits. Associé à 麒 , 19 traits aussi, pour former 麒麟, un animal mythologique chinois ressemblant à notre licorne. Avec 42 traits, il fait sacrément peur!

: náng, 25 traits. C’est le nom du pain Ouighour dont on raffole au restaurant. 

Et le vainqueur de la soirée :

: cuàn, 29 traits. Littéralement cuire avec le feu. En pratique est utilisé dans le nom d’un village Ming touristique en banlieue de Pékin : 爨底下. Le gouvernement l’a rebaptisé 川底下. Les villageois mécontents de perdre pas moins de 26 traits dans le rebapteme ont tenu tête et ont fait de ce caractère 爨 l’emblème de leur village. Aujourd’hui ils vendent des t-shirt avec comme inscription la « recette » pour se souvenir de ce caractère.

vendredi 23 avril 2010

Les tons en chinois

Zhang Yaoli me disait encore au labo cette semaine que selon lui la difficulté quasi insurmontable dans l’apprentissage du chinois est la parfaite maitrise des tons. Selon lui, il n’existe qu’un seul étranger en Chine capable de s’exprimer en Mandarin avec des tons et une prosodie qui ne trahissent pas son origine étrangère, la star Da shan (大山)

Les tons, en termes techniques, c’est utiliser la modulation de hauteur du son pour exprimer du sens. En plus clair, c’est exprimer du sens en mettant son langage en musique. Pour un étranger en Chine, il faut donc apprendre à comprendre une partition. Voici quelques clés.


1) Syllabes isolées

Rappelons qu’en mandarin standard, la prononciation d’une syllabe isolée intègre un aspect musical que l’on appelle le ton de la syllabe. La lecture d’une syllabe écrite en pinyin récapitule l’ensemble de l’information nécessaire à la prononciation de cette syllabe isolée. Par exemple dans běi, le groupement bei correspond à l’aspect phonétique de la prononciation, l’accent en forme de V sur le e indique le ton. 

En mandarin standard il existe 4 tons standards pour les syllabes isolées. Chacun de ces tons correspond à un motif musical que l’on peut représenter sur une portée simplifiée :


  • Le 1er ton (阴平) représenté ici en vert est un ton plat et aigu, sans variations de la hauteur du son.
  • Le 2ème ton (上声) représenté ici par la flèche bleue du haut est un ton montant, démarrant à hauteur intermédiaire, et finissant dans les aigus.
  • Le 3ème ton (阳平) représenté par la seconde flèche bleue ressemble à un 2ème ton qu’on aurait cherché à emmener vers le bas en début de son, avant qu’il ne se libère et cherche à rattraper son retard vers les aigues en fin de son. Pour le prononcer il faut commencer par aller chercher les sons les plus graves au fond de la gorge, puis remonter comme un élastique vers les aigus.
  • Le 4ème ton (去声) est une longue descente des sons les plus aigus vers les sons les plus graves.

La hauteur absolue à laquelle est prononcé un ton n’est pas importante, mais les hauteurs relatives le sont. Ainsi le 4ème ton descendant démarre plus haut que le 1er ton, et doit descendre aussi bas que le 3ème ton dans sa partie grave.

Une notation chinoise de la mélodie des tons est souvent effectuée à l’aide des chiffres de 1 à 5. Chacun de ces chiffres correspond à une hauteur de son, 1 est le son le plus grave, 5 le plus aigu. Le premier ton est ainsi noté 44, le deuxième 35, le troisième 214 et le quatrième 51.

A cela il faut rajouter une variation de volume, à peu près identique sur les 4 tons : un rapide crescendo suivi d’un lent decrescendo.

Le site suivant propose une prononciation de toutes les syllabes phonétiques chinoises, avec leurs tons.


2) Liaisons entre deux syllabes

La prononciation des syllabes isolées avec leur ton permet de lire correctement les caractères chinois pris individuellement. Mais dès lors que l’on cherche à prononcer des mots, et non plus seulement des caractères monosyllabiques, il va falloir apprendre à faire la liaison au niveau tonal entre deux syllabes.

Gardons en tête que le ton est l’aspect mélodique de la prononciation des syllabes chinoises. Ils sont définis de façon stricte et unique au niveau des syllabes isolées, mais des variations apparaissent lorsque l’on lie deux syllabes entre elles pour améliorer la fluidité de l’élocution. 

Trois grands types de variations existent.


Le premier type de variations correspond à la difficulté d’enchainer deux « vagues mélodiques » à la suite. Par vague j’entends une descente vers les graves suivie d’une remontée vers les aigus dans un temps unité correspondant à l’articulation d’une syllabe. Ainsi l’enchainement de deux 3ème tons modifie les tons (2 vagues en deux syllabes), l’enchainement d’un 3ème et d’un 2ème ton aussi (2 vagues en deux syllabes), mais pas l’enchainement d’un 4ème et d’un 2ème ton (1 vague en 2 syllabes).

L’enchainement de deux 3ème tons à l’origine décrit par 214-214 devient un 35-214. On dit communément qu’un 3ème ton précédent à un autre 3ème ton devient un 2ème ton. Ex : 法语,美女 ,可以. 

L’enchainement du 3ème et du 2ème ton est aussi modifié, car le 2ème ton est censé démarrer plus bas que le 3ème ton ne finit, ce qui impliquerait une 2ème vague dans l’enchainement des 2 syllabes. Le motif 214-35 est donc transformé en 212-25. Ex : 语言,法国. 



Le 3ème ton est ici tronqué dans sa remonté vers les aigus. Cette existe en fait aussi lorsque le 3ème ton est suivi d’un 1er ou d’un 4ème ton. Le 3ème ton pur n’est donc jamais prononcé dans sa totalité dès lors qu’il est suivi d’une autre syllabe !



Le second type de variations concerne les liaisons avec les 4ème ton. Le 4ème ton est le ton fort du mandarin. C’est le seul ton à explorer l’ensemble de la portée, du plus aigu vers le plus grave. Il est sec, il se différencie nettement des autres, et nous verrons un peu plus tard qu’il rythme la phrase. L’enchainement de deux 4ème tons est lent et oblige à un ralentissement du rythme. Les modifications inhérentes à la liaison avec le 4ème ton seront donc généralement rejetées au problème de la prononciation de la phrase. Certaines modifications apparaissent néanmoins déjà au niveau des mots individuels :

Les variations les plus communes sont celles de 一 ou 不 . 一 (yì dès qu’il ne désigne plus le chiffre 1) et 不 (bù) sont normalement prononcés avec des 4èmes tons, mais cela change lorsqu’ils sont suivis d’un second 4ème ton. Il faut donc alors les prononcer comme des 2èmes tons. Ex : 不对,不会,一定,一个.

Lorsque qu'un quatrième ton apparait en première position dans un groupement de 2 caractères, il sera souvent atrophié, "neutralisé", en un ton bref et sans variations de hauteur. Le meilleur exemple est 第, caractère qui annonce un adjectif ordinal, et apparait donc toujours suivi d'un nombre. 第 est censé être un 4ème ton, mais en écoutant les chinois parler, il est impossible de distinguer ce quatrième ton: il est atrophié. 第一 devient un di continu, 第二 est exprimé avec un di bref en haut de portée, suivi du 二 descendant. Autre exemple: 部队

Les premiers tons dont la hauteur est légèrement inférieure à la haute d’où part le quatrième ton sont légèrement rehaussés pour éviter une montée du son avant la descente du 4ème ton. Ainsi le 家 dans 家电 est prononcé plus aigu, et le son est fluide au passage du 1er vers le 4ème ton. 


Le rehaussement du 1er temps vers les aigus existe en fait aussi lorsqu’il est suivi d’un 3ème, d’un 2ème ton ou d’un ton neutre. C’est pourquoi les diagrammes de tons sont généralement donnés avec un 1er ton en 55. Il existe pourtant indéniablement une différence de hauteur entre un 1er ton prononcé individuellement, et un 1er ton suivi d’une deuxième syllabe.



Le troisième type de transformation est l’apparition des tons léger (轻声) dans la deuxième syllabe. En Français on parle généralement de ton neutre, ou de 5ème ton. L'appellation est trompeuse car en fonction du ton long précédent le long léger, la hauteur de celui-ci ne sera pas identique.On considèrera qu'il existe deux tons tons légers, tous deux prononcés tels des note piquées, courtes et légères, sans variation de hauteur.

Le premier ton léger suit un 1er, 2ème ou 3ème ton. Sa hauteur est intermédiaire, on le notera par 3’. Après un 1er et un 2ème ton, il sonne plus bas que la hauteur finale du ton qui le précède, mais après un 3ème (tronqué) , il sonne plus haut que la hauteur finale du ton qui le précéde.

Le second ton léger suit un 4ème ton. Sa hauteur est basse, au niveau de la hauteur finale du 4ème ton. On le notera 1'.

  • Après un 1er ton : 东西,桌子 55-3’
  • Après un 2ème ton : 头发, 便宜 35-3’
  • Après un 3ème ton : 好了 212-3’
  • Après un 4ème ton : 凳子,似的,豆腐 51-1’





3) Transformation des tons dans la phrase

La phrase. Si la prononciation des syllabes isolées ou des groupements de deux syllabes permet d’exprimer des caractères et des mots isolés, l’aspect pratique de la communication repose dans la phrase, et il faut apprendre à adapter la musicalité des caractères et mots pris individuellement à la phrase chinoise. Si le ton désigne le motif musical de la syllabe, la prosodie désigne la musicalité de la phrase dans son ensemble. 

Plusieurs types d’élocution existent en Chinois. Si la lecture de poèmes chinois doit se faire avec un respect très strict des tons des syllabes et mots individuels, ce n’est pas le cas dans l’expression en langue courante. Des variations importantes apparaissent dans les tons dès lors que l’on lie les mots entre eux dans une phrase, et que l’on accélère le rythme. L’unité musicale n’est plus le caractère ou le mot, mais la proposition, ou le groupement que l’on prononce sans respiration. 

Aurélien a magnifiquement identifié la transformation des tons individuels lorsqu’ils s’intègrent à la phrase. Les trois premiers tons longs deviennent des tons brefs, sans variations de hauteur. Le premier ton est placé en milieu-haut de la portée, en position 3-4, et les 2ème et 3ème tons sont placés en bas de la portée, en position 2. Seul le quatrième ton reste un ton long, et s’exprime dans sa globalité. Le 4ème ton rythme la phrase de ses claquements réguliers. En exagérant un tout petit peu, on peut même essayer de prononcer à la même hauteur les 3 tons brefs, et n’articuler que les 4èmes tons. Certains sinisants ont d’ailleurs bien compris cela et n’apprennent que les 4èmes tons. Un frein malgré tout à cela : le dernier, ou les deux dernières syllabes de la proposition doivent être correctement prononcées, avec leur juste ton long…

Un exemple : 我可以讲法语. Que des 3ème tons. On apprend généralement que les 5 premiers 3ème tons doivent devenir des 2ème tons, par transitivité de la règle de transformation de 3ème ton lorsqu’il précède un autre 3ème ton. La réalité de la chose, c’est que seul le 法 devient un 2ème ton, et les 4 premières syllabes se prononcent toutes sans variations de hauteur, avec des tons brefs. Essayez un peu…

Une nuance à propos du 4ème ton : quand plusieurs 4ème tons sont enchainés dans une même proposition, seul le dernier d’entre eux est réellement appuyé, les autres deviennent des tons neutres, placés tout en haut de la portée. Par exemple 部队, qui doit être prononcé avec deux 4èmes tons très distincts 51-51 lorsqu’il est prononcé individuellement, doit être prononcé 5’-51 dans la phrase. 



Voilà, beaucoup d'analyse aujourd'hui de la "structure musicale" du mandarin oral.  Le but de cette compréhension selon moi est d'arriver à passer à une écoute active du "parlé musical" des chinois, et ainsi  pouvoir mieux s'ouvrir à cette langue tonale. Il ressort en effet que les étrangers qui maitrisent les mieux les tons du chinois sont souvent les mêmes qui ont appris à écouter la musique...

Sushis


Conséquence insolite de la fermeture de l’espace aérien européen : les sushis au saumon des restaurants Japonais de Pékin subissent une augmentation brutale des prix. Mais où s’approvisionnent-ils donc ?

mardi 20 avril 2010

Yushu, Yushu, Yushu

7h30 le réveil sonne, j’allume la radio pour écouter un peu de musique. Hm, il n’y a pas le programme musical habituel. Ça parle de Yushu, la ville sinistrée par le tremblement de terre de la semaine dernière. J’ai besoin de quelque chose de plus gai au réveil, passons sur la station suivante. Hein, ça parle aussi de Yushu. Je continue à faire défiler la bande FM, mais toutes les stations sont axées sur le même sujet : Yushu. J’entends qu’il s’agit d’une 哀悼活动, un mouvement de deuil envers les victimes de Yushu. 

J’essaye la télé. Les 38 chaines passent le même programme : Yushu, Yushu, Yushu. 

J’essaye internet. De google musique à Youku (le youtube chinois), tous les sites de divertissement ont interrompu leur service en guise de deuil pour la sinistrée de Yushu. Partout le même message : 悼念青海玉树地震遇难同胞

Bref, aujourd’hui on ne se s’amuse pas en Chine, on porte le deuil de Yushu. La cause est sincère, mais la mainmise gouvernementale sur les médias est effrayante !

lundi 19 avril 2010

Acheter un violoncelle à Pékin

Chose promise chose faite. Je suis maintenant possesseur d’un formidable violoncelle chinois acheté ce samedi à Pékin ! Samedi c’est Aurélien qui m’a accompagné pour m’aider à bien choisir. Encore une fois, un grand merci ! Si vous vous aussi vous habitez à Pékin, vous jouez du violoncelle et vous ne voulez pas renoncer à votre instrument sous l’excuse de vivre en Chine (là j’ai perdu tous mes lecteurs …) et que vous n’avez pas d’Aurélien sous la main, voici quelques informations pratiques qui pourraient vous être utiles.

La plus grande concentration en luthier doit se trouver sur 新街口南大街, juste au nord de la station de métro 平安里, du côté Est de la rue. Une bonne vingtaine d’enseignes vendent des instruments de musique chinois comme occidentaux. En particulier 4 ou 5 parmi eux proposent quelques violoncelles. 

Les prix les plus bas se situent entre 1000 et 2000 RMB. Ceux-ci sont en partie faits à la machine, et je ne sais pas s’il y existe une liaison de cause à effet, mais ce ne sont pas de bons instruments. Le son n’est pas bon, l’instrument peu maniable. La finition n’est pas bonne, les chevalets démesurément grands le prouveront.
Pour un instrument agréable à jouer, il faudra se rapprocher des 3000 RMB. J’ai trouvé deux instruments qui me satisfaisaient. L’un à 3000 RMB, le second à 3500 RMB, tout d’eux après discount respectives de 500 et 300 RMB. Le second était plus vif et entre mes mains il me rappelait davantage mon instrument resté en France,je l’ai ramené avec moi.

Je pense que la stratégie à adopter pour acheter un violoncelle à Pékin est de savoir qu’il faut dépenser une somme comprise entre 2000 et 8000 RMB pour l’achat d’un instrument, puis essayer les divers instruments de tous les luthiers de la rue pour comparer. Les instruments que vous trouverez satisfaisants se retrouveront naturellement dans une gamme de prix correspondant aux exigences que vous avez envers l’instrument. Les vendeurs luthiers ne semblent pas essayer d’arnaquer méchamment l’acheteur étranger, du moins pas tant que celui-ci sait manier l’instrument et communiquer en Chinois. 

Au niveau des pièces secondaires, un archet de base est offert avec le violoncelle, et un archet de meilleure qualité s’achètera au prix de quelques centaines de RMB. Les housses molles sont gratuites, les boites rigides et légères en mousse sont à 350-400 RMB, les boites blindées vraiment solides sont à 600-700 RMB. Possibilité de se faire offrir un jeu de corde, un pupitre, un repose-violoncelle, une colophane, pour l’achat du violoncelle avec sa boite.

Prochain article sur où trouver de bonnes partitions pour violoncelle à Pékin !

dimanche 18 avril 2010

许三观卖血记 - Le vendeur de sang

21 mois après en Chine, j’ai enfin achevé mon premier roman chinois en chinois ! 许三观卖血记, ou "Le vendeur de sang" de son titre français. Ecrit par 余华 (Yu Hua) c’est l’histoire d’une vie. La vie d’un jeune homme qui arrive en âge de se marier alors que la Chine tombe entre les mains de Mao. Un jeune homme aux sentiments d’une simplicité naïve qui ponctuera tous les évènements marquant de sa vie par la vente de son sang. 

Le style d’écriture est déroutant. Il y a quelque chose de chinois là dedans, mais j’ai encore du mal à en distinguer l’origine. La simplicité dans l’expression et les pensées intérieures des personnages contraste avec la description riche et minutieuse du cadre et des mouvements. Mais il y a quelque chose d’autre. 

Le cadre historique est passionnant. Le héros Xu Xanguan est né à la campagne, et grandira à la ville. Il y trouvera sa femme en sachant parler au père. Il fondera une famille, et ensemble ils passeront à travers les évènements historiques du grand bond en avant, de la grande famine qui en suivra, la révolution culturelle. 

Le cadre culturel est riche aussi, on y trouve de belles figurations de la société chinoise. J’y ai découvert la peur d’un futur toujours trop instable. Quand la société n’est pas organisée pour protéger les individus, les moyens face à l’adversité sont maigres. Notre héros vend son sang. Que pourrait-il faire d’autre ? Il essaierait peut-être d’emprunter de l’argent. Il est d’ailleurs amener à le faire au cours de l’histoire. Et la lecture de cette épisode m’a enfin donné un moyen de ressentir un petit peu ce à quoi pensent les chinois d’âge moyen quand ils nous parlent des problèmes d’emprunt d’argent.

Les relations de notre héros avec sa femme, avec ses enfants, avec ses voisins, avec le quidam m’a beaucoup appris sur un état d’esprit différent, encore très traditionnel. Dans les attentes réciproques de Xu Sanguan et de son épouse, dans les rôles qu’ils se donnent au sein de la famille, etc.

En dehors de tout ce que j’ai pu trouver dans la lecture de ce livre, le fait de l’avoir lu est un évènement symbolique. C’est le symbole de l’accès à une compréhension de la Chine telle qu’elle est, et non plus seulement l’accès à une compréhension tronquée de la Chine, tronquée par une trop faible aptitude à communiquer et à comprendre en Chinois. Certes il y avait toujours pas mal de caractères inconnus sur lesquels je suis passé, certes l’écriture de Yu Hua est relativement accessible, mais "Le vendeur de sang", je l’ai lu, je l’ai compris, et ce dans une période de temps raisonnable. 

Me voici dans le grand bain !

samedi 17 avril 2010

Le Wenyan wen (文言文) ou chinois littéraire

Une petite introduction au Wenyan wen qui fait office de réponse à quelques questions qui me sont longtemps restées sans réponses: 

Lors de ma visite de Hong-Kong en juillet dernier, j’avais un peu discuté avec un libraire local de la langue cantonaise. Je me souviens avoir fortement douté de lui quand il m’avait expliqué que le cantonnais était uniquement une langue orale, et que les cantonnais utilisaient le mandarin quand il s’agissait de passer à l’écrit.
J’ai eu la confirmation dernièrement que la langue traditionnelle d’expression des auteurs cantonais n’était effectivement pas le cantonais, pas non plus le mandarin en réalité, mais une langue écrite partagée par tous les lettrés de l’empire : le Wenyan wen (文言文), aussi appelé chinois littéraire.


Dans l’apprentissage d’un nouveau mot chinois, on doit apprendre les caractères qui composent le nouveau mot, la prononciation du mot, les locutions et contextes dans lesquels il apparait, mais aussi son niveau de langage : langage oral (口语) ou langage écrit (书面语). L’emploi de langage oral à l’écrit fait vulgaire, et l’emploi de la langue écrite à l’oral choque encore plus. Les chinois ne manquent pas de me reprendre quand je tente de replacer les nouveaux du jour à l’oral alors qu’il s’agit de langage écrit. La différence entre langage oral et langage écrit existe naturellement en Français, où l’on parle de langage courant ou formel, mais la différence très marquée entre langue orale et langue écrite en Mandarin m’a toujours surpris. 

La raison à cela ? Son origine. Le mandarin écrit est un mandarin formel qui descend du Wenyan wen, une langue bien différente du mandarin oral aujourd’hui. 


J’ai fait beaucoup appel à mes amis et connaissances chinoises pour des recommandations de lecture. J’ai d’abord été surpris par l’absence de réponse spontanée en faveur de tel ou tel bouquin. Il leur fallait absolument une orientation préalable avant de pouvoir me conseiller quelque chose. Je précisais alors : un roman, ou un recueil de nouvelles, une pièce de théâtre, bref, n’importe quelle histoire narrative d’imagination. Ils m’emmenaient alors dans le rayon des œuvres étrangères traduites en chinois. Echec. Je rajoutais donc d’inspiration chinoise à mes critères précédents. Ils pensaient alors tous et unanimement aux grands classiques de la littérature classique chinoise, à commencer par la pérégrination vers l’ouest (西游记) et les 3 royaumes (三国演义). Mais ils m‘indiquaient que ces bouquins étaient à l’origine écrit en Wenyan Wen, et qu’il me faudrait donc chercher une traduction en 白话, ie langue vernaculaire, mandarin d’aujourd’hui. Echec, c’était encore une sorte de traduction. Je précisais donc encore : un roman, ou un recueil de nouvelles, une pièce de théâtre, bref, n’importe quelle histoire narrative d’imagination d’inspiration chinoise et écrite en chinois d’aujourd’hui. Critères qui ne me paraissaient pas particulièrement rigoureux. Je me privais en fait ainsi de la plus grande partie du contenu de la librairie. 

La raison à cela ? Presque tout écrit littéraire antérieur au XXème siècle n’était pas écrit en langue vernaculaire, mais en Wenyan wen, et ce que l’auteur soit pékinois, shanghaiens ou cantonais.


Vous l’aurez compris, le wenyan wen fut le latin de l’empire chinois. La langue de communication écrite des lettrés de l’empire, et ce quelque soit leur dialecte maternel. Et si en France le Français remplaça le latin dès le XVIème siècle, notamment sous l’impulsion de Du Bellay et les poètes de La Pléiade, il aura fallu attendre le début du XXème siècle et des auteurs comme Lu Xun (鲁迅) pour que le même type de révolution de la langue écrite se produise en Chine. Nous ne nous interrogerons par aujourd’hui à la raison d’une révolution aussi tardive, mais nous mesurons tout de suite son impact sur la production littéraire en langue vernaculaire chinoise : elle a moins d’un siècle ! Alors, qu’est-ce qu’on attend pour se mettre au Wenyan Wen ?

vendredi 16 avril 2010

老外 - Laowai !

老外- Laowai ! 

Si vous avez déjà mis les pieds en Chine, vous avez à coup sur déjà déclenché quelques volées de Laowai ! Laowai, c’est le petit cri que pousse le chinois ou la chinoise de base dès qu’il ou elle aperçoit un ou une occidentale. Et plus vous vous enfoncez dans l’intérieur du pays, plus vous l’entendez. 

Littéralement, vieil étranger. Mais cette traduction est mauvaise. L’adjectif 老 = vieux est affectif en chinois. Ainsi les parents appellent parfois l’ainé de leurs enfants 老大 = vieux grand, et le cadet 老二 = vieux second. Donc 老外 = vieil étranger est un terme affectif. 

Vraiment ? Si vous en doutez comme moi, tapez donc 老外 dans la section image de Baidu, le moteur de recherche de chinois… Voici les 8 premiers résultats :
















jeudi 15 avril 2010

春捂秋冻

春捂秋冻

Variante chinoise de notre dicton « En avril ne te découvre pas d’un fil, en mai fais ce qu’il te plait. » En seulement 4 syllabes il nous invite à rester bien couvert à l’approche du printemps, et inversement à ne pas aller trop vite à l’arrivée de l’hiver. 

Si au mois d’octobre on doit essayer de supporter un peu le froid avant de sortir les anoraks, c’est pour obliger l’organisme à s’habituer aux nouvelles conditions de température, et à se préparer aux terribles mois de décembre et janvier.

Et au mois d’avril, ce n’est pas pour obliger l’organisme à s’habituer doucement aux conditions de température estivales, faites moi confiance, ça il le fait très bien de toute façon, non, c’est en raison de l’effet Yoyo du climat du nord du pays. Fin février les températures repassaient en positif et on avait déjà l’impression que le printemps pointait le bout de son nez. Le vieux Pékinois ne s’excitait pas trop, et nous prédisait trois violentes chutes de température avant le réel avènement du printemps. Et c’est réellement ce qui s’est passe, et à chaque rechute c’est une nouvelle épidémie de rhume.

Depuis le week-end dernier nous sommes dans la période de 3ème rechute des températures. Alors que nous avions mis les anoraks et gants au placard et ressortis les polos d’été avec une température qui dépassait allégrement les 20 degrés au plus chaud de la journée, il a fallu les ressortir cette semaine avec des minimales autour de zeros degré, et et et - et plus de chauffage, car il est coupé partout depuis le début du mois ! 

Ce qui est le plus amusant dans cette période de température à effets Yoyo, c’est le phénomène de 乱穿衣, la fantaisie dans l’habillement. Dans la rue les anoraks, gants et écharpes côtoient t-shirt, petites jupes et bermudas. Le plus beau contraste que j’ai vu était sur une même personne, Shaoyu, une amie Malaisienne, habillée en short et tongs en bas, anorak et cache-oreilles en haut…

mercredi 14 avril 2010

Un week-end à Shanghai

Germain, 1m80, le crane déjà un peu dégarni, nantais d’origine, chinois d’adoption, un doux accent du sud quand il parle chinois, et possesseur d’un magnifique appart dans la concession française de Shanghai (ainsi que de la copine chinoise offerte dans le package). 

Aurélie, lyonnaise d’origine, chinoise d’adoption, spécialiste en sciences politiques, pékinoise avant les JO, aujourd’hui Shanghaienne à l’approche de la World Expo, elle est toujours la première sur les grands évènements. 

Germain, j’ai suivi ses traces dans le campus de Tsinghua où il me précédait d’une année. Il est d’ailleurs déjà passé sur ce blog. Malgré un optimisme quasi infaillible, il rentrait l’été dernier en France avec la résolution ferme de ne pas remettre les pieds en Chine de sitôt. Marre de Pékin ! Un mois après il se faisait embaucher sur Shanghai.

Aurélie, on partageait les mêmes bancs d’école quand on avait 12 ans. On a appris l’Anglais ensemble, et avec les mêmes profs. Sans doute l’origine de notre passion commune pour le Chinois… Elle quittait Pékin à la veille de mon arrivée, mais n’a pas attendu longtemps pour revenir à bosser à Shanghai, d’abord en stage, aujourd’hui vraiment embauchée. Elle nous proposait à l’époque un petit comparatif de Pékin et Shanghai

Avec Pierre nous rendions donc visite à Germain et Aurélie ce week-end, en guise de match retour avec Shanghai pour reprendre les mots de PA . Arrivés par le train de nuit au petit matin vendredi dernier, nous avions en tête un week-end tranquillou, pas vraiment orienté tourisme, mais beaucoup plus découverte du Shanghai’s Way of Life. 

Malgré la pluie qui n’a pas cessé de tomber durant les 3 jours de notre visite, on a tout de même fait un petit pèlerinage vers le musée de Shanghai, la Nankin Road, le Bund, le vieux Shanghai, la concession française. Petite déception quand j’ai réalisé une fois de plus que la beauté que nous trouvons à la Chine repose souvent dans notre incompréhension de celle-ci. En plus clair, si Shanghai est une ville à couper le souffle quand on y découvre la Chine en provenance directe de Paris, elle semble beaucoup plus banale lorsque l’on vit à Pékin.

Banale, vraiment ? En réalité, non, Shanghai est une ville extraordinaire parmi les villes chinoises. 

Extraordinaire par son internationalisation. En particulier dans le quartier de la concession française où nous nous sommes pas mal baladés. Des Laowai partout, des Chinois qui parlent Anglais, une crêperie Bretonne, un pub irlandais, une boulangerie Paul, une boutique de matériel de cuisine à la Française, etc. 


Aurélie et Pierre à la crêperie bretonne


 Pour faire des bons ptits plats à la maison!


Paul!  On veut le même à Wudaokou!

Extraordinaire aussi par la concentration en konbini (便利店) dans la ville, au moins autant qu’à Tokyo ou Taiwan. A Pékin, ils apparaissent tout juste, à Wudaokou deux pauvres 7.11 se battent en duel avec le concurrent Coréen. Et si la modernité à l’Asiatique se mesurait à la concentration en konbini ? 

Extraordinaire par ses rues. Des rues à deux voies. Deux voies, deux sens. Pas de barrière au milieu. Pas de passage souterrain pour traverser. Des rues pas forcément rectilignes. Bref, des rues comme on se les imagine quand on vit France. Mais des rues qu’on oublie quand on vit à Pékin.

Bref, un week-end à Shanghai, ça rompt franchement avec le quotidien pékinois. C’est comme si Pékin était encore à l’université alors que Shanghai était déjà rentrée dans le monde du travail. Ça fait réfléchir et ça donne de nouvelles idées. Et puis une rupture du quotidien, c’est aussi souvent déclencheur de nouvelles bonnes résolutions. La bonne résolution du week-end, c’est d’aller acheter un violoncelle dès ce samedi, et rejoindre Aurélien dans son petit orchestre à Pékin !

mardi 6 avril 2010

塞翁失马 - Le cheval de Sai Weng

L’histoire se passe il y a plusieurs siècles de cela dans un petit village chinois situé non loin de la frontière nord du pays. Sai Weng, une vieille dame, y élève des chevaux avec son fils. Un beau jour l’une de ses juments s’enfuit. Malgré la terrible perte Sai Weng garde le moral. Et elle fait bien car quelques jours après sa jument revient, et ne revient pas seule. Avec elle un bel étalon sauvage venu des grandes plaines. Sai Weng ne s’en réjouit pas plus que cela. Et elle fait bien car en essayant de monter ce bel étalon sauvage son fils chute et est gravement blessé. Il perd l’usage de ses jambes. Une tragédie ? Assurément, mais la vieille Sai Weng sait que s’il ne faut pas se réjouir trop vite, une perte n’est forcément aussi grande qu’elle n’en parait. Et elle fait bien. L’année suivante la guerre éclate. C’est la conscription. Tous les hommes valides doivent partir à la guerre. Elle sera la seule femme du village à garder son fils auprès d’elle.

塞翁失马, une petite histoire chinoise qui nous apprend que sur cette terre aucun évènement n’est purement malheureux, aucun évènement n’est purement heureux.

lundi 5 avril 2010

Un peu de grammaire chinoise

La grammaire chinoise est d’une simplicité enfantine. C’est bien connu. Enfin, cette idée fausse est bien connue. Idée fausse globalement répandue par tous les petits rigolos qui se sont contentés d’un apprentissage des plus basiques du chinois. 

Il est vrai que dans sa structure de base le chinois est très direct, et ne s’embête pas avec des problèmes de conjugaisons, de genres, de déclinaisons, d’accords. Les Chinois ont eu la bonne idée d’adopter des natures de mots qui s’identifient quasiment aux nôtres : noms, verbes, adjectifs, adverbes, et particules à la con. Et tant que l’on se limite à l’emploi des deux premiers susnommés, la structure de la phrase est simple comme bonjour : Sujet-Verbe-Complément. Je mange du riz devient 我吃米饭 = Je Manger Riz. 

On entend souvent comme idée fausse que l’emploi des classificateurs est une difficulté principale du chinois. C’est très faux. Un classificateur, c’est quelque chose de simple à comprendre. Nous en utilisons d’ailleurs en Français, mais seulement dans le cas des noms indénombrables : une baguette de pain, une tranche de saucisson. Baguette et tranche sont interprétées dans une logique grammaticale chinoise comme une nouvelle classe grammaticale, celle des classificateurs. En Chinois, les noms dénombrables possèdent aussi leur(s) classificateur(s). Un éventail par exemple se dit 一把扇子. 

La difficulté inhérente aux classificateurs, c’est qu’il faut savoir lequel utiliser avec tel nom, et ce afin de ne pas avoir l’air ridicule en demandant une baguette de saucisson ou un carré de pain. Difficulté minime en réalité, puisque d’une part dans le sens de la compréhension, l’information apportée par le classificateur est secondaire, et dans le sens de l’expression, au moins à l’oral, il existe un classificateur passe-partout (个) qui peut s’appliquer dans presque toutes les circonstances. 

A l’écrit en revanche on se doit de s’exprimer avec des classificateurs appropriés. L’apprentissage des classificateurs peut paraitre difficile, mais c’est en réalité une tâche bien mince en comparaison de celle de l’apprentissage des tons et de l’écriture du caractère. Etant donné que la majorité des étrangers occidentaux apprenant le chinois n’apprennent ni les tons, ni l’écriture des caractères, il ne reste plus que le problème des classificateurs, et c’est sans doute la raison de toute l’histoire que l’on fait autour d’eux. 

Je rajouterai enfin à propos des classificateurs que leur apprentissage est rendu relativement aisé par une certaine logique dans leur choix. De même que l’on utilise le mot tranche pour qualifier des objets d’ont l’épaisseur est faible par rapport aux autres dimensions (une tranche de pain, une tranche de viande, une tranche de saucisson, une tranche de vie, une tranche de société), on utilisera en chinois un même classificateur pour les noms ayant en commun une caractéristique essentielle. Ainsi les objets dont la particularité première est d’être tenus à la main sont précédés du classificateur 把 : 一把扇子,一把伞, 一把钱 : un éventail, un parapluie, une petite somme d’argent. 

Nous pouvons donc complexifier un petit peu notre phrase de départ en la transformant en « Je mange un bol de riz » : 我吃一碗米饭 = Je manger un bol riz. Riz étant indénombrable, cherchons un deuxième exemple avec un nom dénombrable, et rajoutons un verbe auxiliaire, verbe qui va permettre d’exprimer le désir ou la capacité : 我要买三件衬衫, je veux acheter trois chemises = Je vouloir acheter trois (classificateur des vêtements) chemises. Le nom chemise est bien précédé de son classificateur: 件

Cependant dans certaines situations nous rencontrons des noms qui sont employés sans classificateurs. Parfois parce qu’on peut les oublier, comme dans 我是法国人 = Je suis français, comme simplification de la phrase 我是一个法国人 = Je suis un français. Parfois parce qu’ils font parti d’une classe particulière, les 动宾搭配 = Locutions verbe-objet. Par exemple 建设社会,学习汉语,提高效率 : Construire une société, appendre le chinois, améliorer l’efficacité.

Je viens de parler de locutions. Plus connus sous le nom de 搭配 (dapei) en chinois ou de Collocations en Anglais. Le terme désigne une association particulière de mots, reliés non seulement par le sens, mais surtout par l’usage. Ainsi même si l’emploi du terme « un cercle bénéfique » en français n’est pas en soi vide de sens, l’usage veut qu’on lui préfère le terme « un cercle vertueux ». Vertueux vient en locution avec cercle. C’est un exemple de locution nom-adjectif. La difficulté des locutions, c’est qu’elles varient d’une langue à l’autre, et ne peuvent pas être devinés, car c’est un problème d’usage, et non de sens. Il faut donc les apprendre de manière systématique. Quand le ciel est dégagé pour un français, il est « clear » pour un britannique. 

Les locutions existent pour les relations noms-adjectifs, il n’y a pas de raison qu’elles n’existent pas pour les relations verbes-noms. Quand les français jouent du violoncelle, les chinois le tirent: 拉大提琴. L’utilisation incorrecte de dapei (= locutions) dans une langue reste généralement l’ultime défaut de l’étranger, car d’une part seule une longue, très longue pratique de la langue, permet de les maitriser, et d’autre part les dapei de notre langue maternelle ont toujours tendance à déteindre un petit peu sur celles des langues étrangères. Le HSK de haut niveau ne manque ainsi pas de tester la connaissance des dapei des candidats : une phrase avec un trou, quatre propositions de termes ayant fondamentalement le même sens, et il faut choisir le terme approprié… Par exemple si vous aimez le riz, il va falloir apprendre à le faire cuire. Mais êtes-vous sur qu’en Chinois on fait vraiment cuire (熟) du riz ? Non, en Chine, on le fait bouillir (煮). Faisons donc bouillir une marmite de riz : 我们煮一锅米饭. 

Nous pouvons donc nous mettre à table. Qui prendra un bol de riz ? Personne? Mais pourquoi ? 吃不下来了 ! On ne peut plus rien avaler. Littéralement manger plus descendre. Nous sommes dans le cas d’un potentiel, qui lui-même dérive d’un complément verbal directionnel (趋向补语). Les compléments verbaux directionnels et leurs potentiels associés sont une classe grammaticale extrêmement puissante en Chinois, et sans équivalents en français. Les anglophones sont déjà plus proches du concept avec leurs phrasal verbs, mais ils n’atteignent pas le degré de pureté des compléments verbaux directionnels chinois. Pendant longtemps je suis passé sur ces derniers sans attarder mon attention, en les snobant de loin, préférant m’attarder sur le verbe seul, élément porteur du sens principal. En réalité je ne les comprenais pas, je persistais à ne voir en qu’eux qu’un élément de complexité inutile. Grâce à la magique Yang Yang laoshi, j’ai découvert qu’ils étaient en fait simples, et pourtant si puissants. J’ai appris à les regarder d’un autre œil, à les voir comme des alliés, et non plus comme des êtres embarrassants dont je redoutais l’irruption. Je souhaite donc vous faire part de cette illumination. Analysons les sens dérivés des quatre compléments directionnels les plus utilisés dans la langue chinoise d’aujourd’hui :

下来 : littéralement descendre dans la direction locuteur. 4 sens dérivés :
  1. Action de fixer quelque chose qui était en mouvement ou volatile : 停下来 (s’arréter),记下来 (prendre en note, on insiste avec le 下来 sur l’idée que l’on prend en note pour s’en souvenir),写下来 (mettre par écrit, il y a une nuance par rapport à écrire),买下来 (acheter, mais on insiste ici sur le fait que le prix et l’acheteur sont maintenant fixés).
  2. Action de séparer : 撕下来 (déchirer, on sépare par ex une page de son livre), 拆下来 (arracher, détacher, par exemple une pièce dans un moteur), 摘下来 (cueillir), 拿下来 (enlever)
  3. Action d’atténuation graduelle. S’emploie ici après un adjectif, qui prend le rôle de verbe dans la phrase : 黑下来 (s’assombrir), 冷静下来 (se calmer),
  4. Indique la continuité jusqu’à l’instant présent d’une action commencée dans le passé : 传下来 (se transmettre),延续下来 (se prolonger),坚持下来 (s’accrocher)
出来 : littéralement sortir dans la direction du locuteur. Le sens dérivé est intuitif : 
  1.  mouvement de l’intérieur vers l’extérieur, du caché vers le révélé, de l’idée vers la réalisation : 说出来 (dire, au lieu de le garder pour soi), 认出来 (reconnaitre, faire passer l’objet du verbe de l’état d’inconnu à l’état de connu),判断出来 (prononcer le jugement – A partir des éléments de l’enquête, il y a eu réflexion, et le résultat est le jugement. Le 出来 insiste sur cette notion de résultat après processus), 摆脱出来 (se libérer, passer d’un état d’emprisonnement ou de pression à un état de liberté). Ainsi 写下来 et 写出来 sont tous construits à partir de verbe 写, écrire, mais le premier insiste sur la prise par écrit, le second insiste sur la production d’un texte étant le résultat d’un processus (une enquête, une réflexion, etc.).

过来 : littéralement venir. 3 sens dérivés :
  1. Caractérise une variation d’emplacement, de direction : 转过来 (transférer), 翻译过来 (traduire), 换过来 (échanger)
  2. Caractérise un retour à la situation normale, ou initiale : 醒过来 (se réveiller), 苏醒过来 (revenir à soi), 改过来(corriger = supprimer les erreurs ), 恢复过来 (retour à la situation normale).
  3. Caractérise l’accomplissement avec difficulté, subir mais tenir. 辛苦过来,熬过来 ,挨过来,挺过来
起来 : littéralement se lever. 3 sens dérivés :
  1.  Caractérise le début ou le développement de quelque chose : 唱起来 (commencer à chanter), 下起雨来 (commencer à pleuvoir), 想起来了 (se rappeler)
  2. Caractérise l’action de rassemblement, et s’oppose ainsi au 2) de 下来. Ex : 捡起来(ramasser), 收起来 (débarrasser (la table)), 扎起来 (attacher (les cheveux)), 集中起来 (rassembler), 积累起来 (accumuler) etc.
  3. Caractérise un à peu près ou un caractère subjectif avec certains verbes particuliers : 算起来 (= ça fait a peu près),看起来 (sembler, mais selon des critères visuels),听起来 (sembler, mais selon des critères auditifs).
Pour résumer avec 4 compléments directionnels nous pouvons exprimer 11 sens dérivés qui permettent de préciser assez justement l’emploi du verbe. Les verbes armés de leurs compléments directionnels sont non seulement plus précis, mais aussi plus imagés. 

Ajoutons une utilisation très intéressante des compléments directionnels: leur emploi avec 弄,  le verbe schtroumpher local. Ce verbe n’exprime rien en dehors de sa qualité d’être grammaticalement un verbe. En lui ajoutant un complément directionnel, on le dote d’un sens. Pour être vague et précis à la fois, le 弄 + complément directionnel est assez remarquable!

Voilà, c’est fini pour la grammaire!

dimanche 4 avril 2010

Dou Dizhu – 斗地主

斗地主 (doudizhu), ou la lutte contre le maitre des terres. Plus qu’un slogan communiste, c’est l’un des jeux de cartes les plus populaires en terre de milieu. J’y ai joué pour la toute première fois l’année dernière dans la réserve des éléphants sauvages du xishuangbanna avec un jeune garçon et sa maman. Une semaine plus tard je devenais la coqueluche de la résidence ancestrale des Zhang de Jianshui, toujours dans le Yunnan, grâce à ma désormais légendaire maitrise du doudizhu. Revenu à Pékin le doudizhu était devenu mon atout premier dans la lutte pour la socialisation.

Cette semaine nous organisions le coin chinois autour du thème des jeux ancestraux et/ou populaires chinois. A côté du Go et des échecs chinois, le doudizhu avait fière allure. Comme je l’ai fait ce jeudi avec quelques élèves étrangers de Tsinghua, je vais maintenant vous révéler les règles du doudizhu.

Le doudizhu se joue à 3 joueurs avec un jeu de 54 cartes, incluant les deux jokers. La plus haute carte est le joker coloré, suivi du joker noir, puis du 2, de l’as, puis ordre classique sans distinction des couleurs. Chaque partie voit s’affronter 2 groupes : d’un coté le dizhu = maitre des terres qui joue seul, de l’autre les paysans qui coopèrent dans leur lutte contre le maitre des terres. Le maitre gagne s’il finit son jeu en premier, les paysans gagnent si l’un d’entre eux finit ses cartes en premier.

Comment se fait le choix du maitre ? Avant de distribuer les cartes on retourne une carte au hasard au milieu du paquet, puis on distribue les cartes une par une aux trois joueurs, jusqu’à ce qu’il ne reste que 3 cartes sur la table. Celui qui tire la carte retournée peut lancer l’enchère. Il annonce un chiffre entre 1 et 3, ce chiffre sera le multiplicateur des résultats à la fin de la partie. S’il annonce directement 3, il devient directement le maitre. S’il annonce 1 ou 2, son enchère peut-être battue par le ou les joueurs suivants, sachant que 3 est l’enchère maximale. Celui qui fait l’enchère la plus élevée devient le dizhu = maitre. Il jouera tout seul, mais il a le bonus de récupérer les 3 dernières cartes non distribuées. Si aucun des joueurs n’annonce d’enchères, on redistribue.

Le jeu de la carte : Le dizhu entame la partie. Il peut jouer une carte simple, une paire, une triple, une quadruple, une chaine de minimum 5 cartes simples qui se suivent, une chaine de minimum 3 doubles consécutives, ou une chaine de minimum 2 triples consécutives. S’il joue une triple, il peut y joindre une carte simple ou une paire. S’il joue une quadruple, il peut y joindre deux cartes simples ou deux paires.

Les joueurs suivants peuvent choisir de jouer ou de passer. Pour jouer il faut impérativement respecter la catégorie entamée par le premier joueur, et jouer plus haut dans la même catégorie. Dans le cas des chaines la carte de plus bas rang détermine le rang de la chaine. Le pli est remporté par le dernier joueur ayant joué quand les 2 joueurs suivants passent consécutivement. (Remarque : passer son tour lors d’un pli n’interdit pas de jouer les tours suivants)

Le joueur ayant remporté le pli précédent relance le jeu dans la catégorie de son choix et le jeu continue, jusqu’à ce qu’un des joueurs joue l’ensemble de ces cartes.

La bombe : 4 cartes identiques forment une bombe et peuvent être joués à la place de n’importe quelle autre combinaison. Le joueur ayant joué la bombe remporte alors le pli, à moins qu’une super-bombe constituée des 2 jokers ne soit jouée. Dans le cas de la bombe il est interdit d’associer 2 cartes ou 2 paires comme c’est le cas dans l’utilisation classique des quadruples. Enfin si une bombe est jouée au cours de la partie, les points marqués ou perdus à la fin de la partie seront multipliés par 2.

Les points : A la fin de la partie le score de base est de -1 pour chacun des paysans, +2 pour le dizhu si ce dernier a remporté la partie, ou de +1 pour les paysans et -2 pour le dizhu s’il a perdu la partie. En devenant dizhu on marque ou perd donc 2 fois plus de points qu’en restant paysan. Même logique qu’au tarot en fait. Le score de base est ensuite multiplié par l’enchère avec laquelle le dizhu a été choisi (1, 2 ou 3), et remultiplié par 2 si une bombe a été sortie au cours de la partie. Au maximum 12 points peuvent donc être gagnés ou perdus par le doudizhu au cours d’une même partie.

samedi 3 avril 2010

马杯 ou la coupe sportive interdépartement de Tsinghua

Enfin un truc vraiment bien à Tsinghua : la coupe sportive interdépartementale (马杯). C’est une grande coupe échelonnée sur toute une année scolaire, et tous les sports praticables sur un campus sont au programme. A chaque compétition chaque département présente une équipe, et cette équipe rapporte des points pour son département en fonction de son résultat. Ce mois-ci c’était la compétition de volley. 

J’ai été ravi quand Wan Xin, un camarade que je n’avais pas revu depuis plus d’un an, s’est souvenu qu’un beau jour de 2008 je lui avais dit aimer jouer au volley, et m’a appelé pour rejoindre l’équipe. Pour une fois on m’a appelé spontanément, un miracle ! J’ai été ravi car notre équipe était sympa et de niveau assez homogène. Mais surtout l’état d’esprit était 认真 sans être 严肃, appliqué tout en restant détendu. Quelques entrainements préalables, des postes assignés, une stratégie élaborée. 

La compétition commençait par des matchs de poules, les 2 meilleures équipes de chaque groupe se qualifiant pour la phase finale. Pour notre premier match nous étions opposés à 新闻, l’équipe du département de journalisme. Un département très féminin dans son effectif, mais qui a malgré tout trouvé assez de renforts masculins pour présenter une belle équipe. Etant les deux équipes de niveau intermédiaire dans le groupe, ce match avait grand enjeu. Une défaite serait quasi synonyme d’élimination pour les deux équipes. Avant de commencer à jouer on serre la main de chaque membre de l’équipe adverse en leur adressant un « 向你学习 – de toi je vais apprendre », une belle réminiscence de l’humilité chinoise. Mais ne vous méprenez pas, chacun la veut, la victoire. 

Tous les points sont accrochés. Chaque équipe arrive à développer son jeu. On perd le premier set de 3 points, on gagne le suivant de 2 points. Notre 拉拉队 – rang de supportrices est bien plus conséquent que celui d’en face et se fait entendre : 核研院!核研院! 核研院!Malheureusement ce ne sera pas suffisant , et nous nous inclinerons 3 sets à 1, un peu déçu de ne pas décrocher la victoire malgré une belle prestation de notre part. 

Le lendemain on affronte l’ogre du groupe, 工业工程, l’équipe d’industrial engineering. Présents en finale l’année précédente, ils sont connus pour être redoutables, avec notamment deux membres de l’équipe officielle de Tsinghua. Dans notre équipe avec 4 joueurs de plus d’1m80 on n’est pas petit, mais on ne faisait pas les fiers quand on a vu arriver un mec de plus de 2 mètres qui n’avait qu’à tendre la main pour nous fusiller d’une balle puissante et irrattrapable. Comme quoi on trouve de tous les physiques parmi les chinois. Nous perdîmes en 3 courts sets, avec l’impression de ne jamais avoir l’occasion de vraiment développer notre jeu. Pas de déception, il aurait fallu un formidable exploit de notre part, comme dirait Dominique Glouglou, pour faire tomber l’équipe d’en face ce jour-là. 

Avec deux défaites en deux matchs, nous n’avions plus d’espoir de qualifications au moment de rencontrer 热能, l’équipe du département de thermal engineering, elle aussi défaite lors de ses deux matchs précédents. Du coup pas beaucoup de sérieux pour ce match que nous avons finalement enlevé 3 sets à 0.

Samedi midi Wan Xin, le capitaine de l’équipe invitait toute l’équipe et les supporters à déjeuner en guise de conclusion. On a perdu, mais on s’est bien amusé. Et c’était cool !

jeudi 1 avril 2010

Mon étrange poisson

Aujourd’hui j’ai acheté un étrange poisson au marché aux animaux d’Wudaokou. Je lui ai aussi acheté un petit bocal en verre en guise d’aquarium et je l’ai ramené au dortoir. En chemin j’ai rencontré mes amis européens. A la vu de mon étrange poisson le français fut tout excité. Il m’a dit vouloir le même pour le montrer à sa copine, ça lui fera une belle surprise. Mon ami allemand m’a posé d’autres questions : « Tu connais l’espèce de ce poisson ? Il a besoin d’eau à quelle température pour vivre ? Comment tu le nourris ? » J’ai répondu gentiment à leurs questions et ai repris mon chemin. A la réception j’ai croisé mon ami Américain. A la vue de mon poisson, il s’est exclamé : « Quel incroyable poisson ! Il vient des states n’est-ce pas ? » Je lui ai répondu : « Peut-être, je ne sais pas » et ai pris l’ascenseur. J’y ai croisé mon ami Japonais qui rentrait aussi chez lui. Il fut très intéressé par mon poisson : « C’est un bien beau poisson que tu as là. Tu crois qu’on pourrait l’élever au Japon ? » Je lui ai conseillé d’essayer et ai regagné ma chambre. Mon voisin chinois faisait à manger, et en voyant mon poisson s’est tout de suite exclamé : « ça se mange ? »

Petite histoire chinoise illustrant assez bien les 偏见 = préjugés des chinois vis-à-vis des étrangers : Les Français sont 浪漫 = romantiques, les allemands sont 科学 = rationnels, les américains pensent qu’ils sont les meilleurs partout, les Japonais veulent s’approprier tout ce qui se fait à l’extérieur, et les Chinois ? Ils aiment manger.